J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mercredi 27 juillet 2016

Le cercle du rivage




Je rentrais à la mer après avoir vainement tenté de fuir l’inquiétude du paysage dont j’étais le reflet. Une mer de mercure renvoyant un miroir parfait autour d’elle absorbait le soleil dans son épaisseur huileuse au fur et à mesure qu’il s’enfonçait sous les nuages, dont les craquelures orange brûlé brillaient. Le jour tombait et se levait dans le même mouvement d’anémone.
Le filet des pluies brouillait la lumière. Je demeurais suspendu entre veille et sommeil sous un ciel de sable incendié.
 J’ai reconnu mon enfance en ôtant mes souliers. Pieds nus sur de doux météorites, j’ai eu le sentiment de n’avoir jamais quitté la plage où j’avais joué avec une adolescente à l'écharpe de laine verte. Elle nourrissait les goélands avec des crevettes pêchées dans l’aurore qu’elle tenait entre ses ongles translucides. Lumière d’eau éparpillée du verre des nuages. La vague qui ralentit en prenant son élan annonce un roulement de tonnerre. De sa coupe, jaillissent des flammèches incolores — on dirait de l’écume — qu’elle ravale en se jetant sur le rivage, dans un fracas clair précédant de quelques fragments le son de la foudre.
Laure Morali " Le cercle du rivage" ( Editions Publie.net 2015)

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